A l’occasion de la soirée de lancement de l’excellent The last of Us dont vous pouvez lire notre test, nous avons eu l’occasion de rencontrer Christophe Balestra, le très brillant co-président français de Naughty Dog.

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Voici avec un peu de retard les meilleurs extraits de cette interview.

Couple of Pixels : Quand avez-vous commencé le développement de Last Of Us et à quel moment avez-vous eu l’idée ?

Christophe Balestra : Tout a commencé juste après Uncharted 2. Définir exactement ce qu’était The Last of Us a pris des mois, voire plus d’un an.  Ensuite, c’est quelque chose qui se fait au fur et à mesure à tous les niveaux.
Au niveau Gameplay, il y a 6 mois, le jeu ne se jouait pas exactement de la même manière.
Au niveau du scénario, on continue d’écrire tout au long du développement car on travaille avec les acteurs, un peu comme une série télé. C’est un process qui est très long. 

On savait dès le départ qu’on voulait raconter une histoire entre deux personnages, c’est vraiment ce qui nous intéressait. Nos sources d’inspiration étaient Uncharted 2 où on a Nathan et Tenzin qui ne parlent pas la même langue et sui sont obligés d’apprendre à se faire confiance malgré ce problème de communication. 

Donc, en fait, ce contraste, c’est quelque chose qu’on voulait recréer entre les deux personnages. Joel est quelqu’un qui a énormément vécu, qui en a lourd sur la patate car il a perdu des gens dans ce monde et puis Ellie qui a 14 ans et qui est naïve, qui a envie de découvrir le monde et qui sera contente de voir un lac ou une forêt. Il s’agissait d’amener ce contraste et de mettre les personnages en situation délicate comme le monde dans lequel il se trouve avec l’infection.

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CoP : Au vu des images et de la violence omniprésente, on a parfois l’impression que le joueur incarne le mauvais rôle. Plutôt que de chercher le dialogue avec les survivants, il va directement les agresser. Quel est le message derrière le jeu : Est-ce que tout le monde est méchant, faut-il se méfier de tout le monde ?

CB : En fait, c’est un monde extrêmement dur et les gens essaient tous de survivre comme ils peuvent. C’est leur motivation principale. Il n’y a pas de violence gratuite, jamais. Il y a toujours une bonne raison pour se défendre. Le contexte est là pour justifier cette violence. Les gens jouent aussi au jeu car Joel va peut-être changer car il est au contact d’Ellie et va voir le monde d’une autre manière donc les choses peuvent évoluer.

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CoP : Pour continuer sur la violence, The Last of us est à mes yeux l’un des jeux les plus violents de Naughty Dogs. Est-ce un choix de design dès le départ ou est-ce l’univers, les personnages et le développement du scénario qui ont fait que le jeu s’est orienté vers cette violence ?

CB : un petit peu des deux. On s’est dit au départ qui si jamais on finissait avec un jeu qui était interdit aux moins de 18 ans, ce ne serait pas vraiment un problème, que nous tenterions l’expérience car nous ne l’avions jamais fait. Et puis, nous sommes un petit peu plus vieux nous aussi, ce sont donc des jeux que nous avons aussi envie de jouer.

Et puis, créer ce monde qui est oppressant où les gens sont amenés à prendre des décisions difficiles, qu’ils ne prendraient pas d’habitude, cela nous a amené à mettre nos personnages principaux dans des situations délicates.

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CoP : Comment les acteurs perçoivent votre travail ? Quel est le processus de travail avec eux ?

CB : Au départ, pour trouver les acteurs, Ashley Johnson et Troy Backer, nous avons fait un système de casting et nous avons repéré Ashley en premier qui nous est tout de suite apparue comme étant la personne qui fallait par sa sensibilité, sa crédibilité, etc. On l’a trouvée très proche du caractère d’Ellie. Puis ensuite, il y a eu une très forte connexion entre elle et Troy, même si Troy est assez jeune et n’a pas vraiment le look de Joel, mais il a cette voix qui fait qu’il peut vraiment l’incarner.

Ensuite, c’est travailler avec eux, les impliquer dans le projet, leur donner beaucoup de choix aussi. Ce n’est pas comme si on allait écrire quelque chose et leur dicter mot pour mot le script. On va souvent leur demander qu’est-ce que toi tu dirais à ce moment-là. On essaie de les impliquer car on travaille avec eux pendant quasiment un an où l’on continue à faire des shoots pratiquement toutes les semaines.

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CoP : Quand on voit les grosses productions de Naughty Dog comme Uncharted et The Last of Us, il ne s’agit pas de game design très originaux et pourtant, il y a quand même une finition, un souci du détail qui fait que ce sont des jeux qui ressortent. Comment faites-vous pour transformer un game design assez basique en une super production ?

CB : Je dis toujours que si tu donnes une très bonne idée à une équipe moyenne tu finiras avec un jeu moyen, mais si tu donnes une idée moyenne à une équipe géniale, tu finiras avec un jeu fantastique. Et je pense que c’est vrai car on a une super équipe. Il y a beaucoup de temps qui est passé à fignoler le jeu, à faire en sorte que les choses soient bien finies et bien faites, ce qui est très important pour nous. On va passer beaucoup de temps sur les détails, c’est peut-être absurde car les gens ne les regarderont jamais.

Je pense qu’on s’inspire de beaucoup d’autres jeux, on ne s’en est jamais caché mais on apporte notre sensibilité à ce que l’on crée et chaque jeu n’a pas besoin d’être 100% original, ce serait très dur, d’ailleurs.

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CoP : Avec Uncharted, vous étiez à l’apogée. Donc pourquoi The Last of Us maintenant ? Pourquoi repartir sur une base nouvelle ?

CB : Cela n’a pas été soudain, cela a été réfléchi. Après Uncharted 2, ce qui s’est passé, c’est qu’on a décidé d’avoir deux équipes parce qu’on avait beaucoup de gens et énormément de talents et on voulait pouvoir leur donner l’opportunité de s’exprimer pleinement. C’est pour ça qu’on a créé cette deuxième équipe et que The Last Of Us a débuté.

C’est vraiment quelque chose  que l’on voulait faire. On avait un moteur, on avait plein de choses en place qui nous permettaient de faire un deuxième jeu. C’était important de créer quelque chose de nouveau pour nous aussi car il faut savoir rester motivé par ce que l’on fait. On ne veut pas faire le même jeu encore et encore.

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CoP : Un élément qui marque dans les productions Naughty Dog est la qualité des dialogues, des cinématiques. C’est une qualité que l’on trouve plutôt au cinéma et qui est aussi amorcée dans Heavy Rain ou Beyond : 2 souls. Que pensez-vous de ce rapprochement entre ces deux médias pourtant différents ?

CB : Je pense que la manière dont on s’exprime dans un jeu vidéo  n’est pas vraiment différente de ce qu’on va faire dans un film. Ce qu’on commence à faire dans les jeux vidéo, c’est raconter des histoires, créer des personnages auxquels les gens vont commencer à s’attacher, ce qui est quelque chose qui a été fait au cinéma depuis des années et des années.

C’est ça qui est nouveau dans le milieu du jeu vidéo : Amener les joueurs à ressentir de vraies émotions. Je pense qu’on a la qualité graphique maintenant qui permet de le faire. Après, ce n’est pas parce qu’on fait du Last Of Us qu’on pourrait être amené à faire un film parce que c’est un métier à part entière et un réalisateur de film ne pourrait pas faire un jeu vidéo car c’est aussi un vrai métier, un vrai moyen d’expression, un vrai art. On fait des jeux vidéo et c’est une aventure humaine, les émotions sont de plus en plus présentes mais à part ça, c’est un média totalement différent.

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CoP : Pour vous, qu’est-ce qu’on bon jeu vidéo ?

CB : Un bon jeu vidéo, c’est un jeu auquel, lorsque tu as fini d’y jouer, tu as envie d’y rejouer,  auquel tu vas penser lorsque tu rentres le soir. Un bon jeu vidéo, ça peut être un jeu comme The Last Of Us qui va te toucher, qui va t’émouvoir, qui va te faire réfléchir lorsque tu rentres le soir ou quand tu te couches. Mais ça peut être aussi un jeu comme Bejeweled qui va te faire rêver de trucs que tu bouges de droite à gauche dans ton sommeil.

Question : Merci !

The Last of Us est disponible en exclusivité sur PS3 et a déjà battu des records de vente depuis sa sortie !

2 commentaires sur “Notre Interview de Christophe Balestra, co-président de Naughty Dog

  1. merci pour l’interview ! mtn place à la ps4 :p j’imagine déjà le résultat vu comment leur prod ps3 mets tout le monde d’accord

  2. En voilà des infos intéressantes. 🙂 Merci pour l’interview !
    Sacré Christophe et ses parties de Bejeweled. 😀

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